Il y a 50 ans en 1967 Montesa decide de fabriquer une trial

En 1967 Christian Rayer est le pilote Français "qui monte" sur le championnat National et International 
 L'usine Montesa qui veut contrer Bultaco décide de lancer une trial . Montesa appelle le jeune pilote Français pour piloter leur Proto.

 Christian nous raconte le début de cette 247cm3 qui va devenir en 1968 la célèbre et mythique ''Cota'' !!

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Christian Rayer :

Lorsque je suis entré chez "Montesa" en 1967, pour piloter et travailler sur leur première moto de Trial, c'était une véritable première car jusque là, aucun pilote Français n'avait jamais été engagé par une firme étrangère pour défendre et faire progresser leur production en Trial, (c'était mieux à l'époque d'être Anglais ? .... )

ainsi, lorsque je me présente à l'Usine à Esplugas de LLobregat, une première machine existe déjà depuis peu, conçue et réalisée avec les conseils du pilote-maison et champion de moto-Cross Espagnol, Pedro-Pi qui dirige le service course et développement de la firme.

Je ne suis pas tout de suite emballé par la machine qui a de gros défauts de conception, mais on me fait gentiment comprendre que c'est bien pour cela que l'on m'a fait venir et que l'on m'a engagé,

il va falloir commencer à concourir avec ce modèle en l'état, dans un premier temps car, dans l'euphorie de vouloir s'implanter sur ce nouveau créneau du Trial, l'usine en a déjà fabriqué une petite cinquantaine afin de pouvoir rapidement les vendre, et rivaliser avec la concurrence sur ce marché (sous entendu "Bultaco").

En fait, plus tard, ces machines seront surtout vendues aux USA, les Américains n'y connaissant encore rien au Trial (ouf !)

Pour mon futur programme "le championnat d'Europe et de France", j'annonce d'emblée aux responsables et à Pedro-Pique dès que possible, vraisemblablement dans l'année qui va suivre, je désirerais participer aux célèbres six jours d'Ecosse,

car pour moi c'est une épreuve emblématique à laquelle je veux pouvoir participer dès que possible ;

pendant toute une année, nous allons travailler à remanier la machine et la faire rapidement progresser techniquement au point que l'on m'annonce que nous allons justement présenter cette future machine, maintenant bien au point, à la clientèle, ce nouveau modèle définitif sera la "Cota 247" ,

à l'occasion des six jours d'Ecosse en Mai 1968.

Je ne reçois la machine à Paris, la N° 000001, que trois Jours avant mon départ (ci-joint la vidéo prise à Chaville juste à mon retour d'Ecosse), la machine est vraiment très belle et très réussie ! ...

 

 

Voilà pour planter rapidement le décor, Il faut savoir que depuis mon adolescence, je rêvais de devenir pilote professionnel en Trial et je venais de franchir depuis un an cette

première étape, mais je voulais concrétiser cela en marquant un grand coup, quoi de mieux que cette course mythique, pour ma première fois et aller bousculer les Britanniques chez eux, et de plus, avec une machine complètement nouvelle ! .....

On est très gonflé quand on a une vingtaine d'années : je ne doute de rien, je pars là-bas avec la ferme intention de faire parler la poudre ! Et qui sait peut-être plus ! ..

Je pars seul, avec la moto dans ma petite Austin-break à plateau, je ferais escale à Sheffield à l'aller comme au retour chez ce sympathiquecouple anglais Monsieur et Madame Skeaner ; pour la petite histoire, Davis Skeaner est un ancien très bon trialiste qui a vécu assez longtemps en France et qui gagnait toutes les courses du championnat dans les années 58 à 60 sur une Motobécane de sa préparation, car travaillant à l'Usine de Pantin,

à l'époque de Deulonnais et des débuts de Claude Peugeot et de Jean Bohec et beaucoup d'autres bons pilotes dont j'ai oublié les noms.

Quand j'arrive à Edimbourg, le staff Montesa est présent, nous serons quatre pilotes, Don Smith venant d'être engagé depuis quelques jours,

Charlie Harris, un bon pilote Britannique et Pedro-Pi bien-sûr ! ...

Une petite anecdote, au moment du pesage au cartel Market, lorsque je me présente avec ma machine, évidemment elle est très remarquée par la presse et les spectateurs présents, on dirait aujourd'hui que cela fait le BUZ !!!!! ou le Scoop !!!! mais nous sommes en 1968,

et je ne m'attendais pas à ce que SH Miller,en personne, vienne me voir, pour discuter et me demander s'il pouvait regarder la machine en détail et même monter dessus ; j'étais un peu surpris, mais surtout flatté ! ...Et Oui,

le grand SH Miller (déjà la légende du Trial)....

 

1968 :Christian dans les rues de Fort Williams en Ecosse

La course va débuter le lendemain et Don Smith, ex-champion d'Europe et très grand pilote professionnel pendant de longues années chez GREEVES fait équipe maintenant

avec moi, c'est incroyable comme situation pour moi, car il n'y a encore pas si longtemps, jeune garçon et spectateur de St Cucufa ou de Clamart, je

n'aurais jamais imaginé discuter d'égal à égal avec lui (de surcroit très sympa !), c'est un peu comme si vous pratiquez la compétition de tennis et un jour vous aller jouer en finale d'un

grand tournoi contre votre Idole Djokovic c'est complètement "ding"..... Mais voilà, la vie c'est ça aussi parfois !... Et Don me dit, avant de partir, le premier jour, « Attention,n'oublie pas de mettre dans ta poche une ou deux livres sterling, car le premier jour, beaucoup de kilomètres, mais aussi la traversée d'un pont à péage sur la route, si tune veux pas rester là ! ... » merci Don du conseil ! ...

Mais après la fin de ce premier jour, où je finirais à zéro point, comme SH Miller devant tout le monde, fini les conseils, le petit Frenchi devient trop dangereux, et le deuxième jour dans Black Water,

j'en ferais les frais et oui ! ... Car lorsque que l'on arrive pour la première fois dans ce genre de course, il faut connaître ; bonjour les pièges ! et Black Water en est un ! ......

Pourquoi ? .... Et bien tout simplement parce qu'il aurait fallu savoir que ce tronçon de parcours dans les montagnes était chronométré par les organisateurs, et qu'il fallait faire un temps assez court,

les Anglais eux, le savaient, résultat, sur ce tronçon particulièrement difficile en raison des passages profonds où les motos s'enlisent facilement, il y aura plus de cent abandons, ce deuxième jour, personnellement, je ne m'en tire pas trop mal, mais comme je ne savais pas,

je prenais mon temps, résultat 20 points de pénalité pour retard au contrôle de passage en inter-zone à la sortie de Black Water... des premières places, me voilà relégué loin dans le classement ! Heureusement, je pus me rattraper durant le reste de la semaine,

mais bon je termine à la douzième place ; sans cette pénalité de retard, juste avec les points dans les non-stop, j'aurais certainement terminé dans les quatre premiers, mais bon, je remporte tout de même trois trophées, (j'ai compris pourquoi ils décernent un trophée au premier nouveau-venu ! et premier étranger confondu dans cette épreuve).

 

Christian , Best Foreign et Best Newcomer ! avec la Montesa Cota 247

J'ai bien aimé cette semaine écossaise, un peu humide et un peu froide, surtout sur ces très longs parcours, alors pourquoi je n'y suis pas retourné, on me pose souvent la question ! ........

Et bien c'est très simple en fait, car l'année suivante, en 1969 je me mariais, l'année suivante, en 70, j'ouvrais mon premier magasin de motos à Chaville, l'année suivante, après de longues tractations,

je quittais MONTESA, pour travailler à la construction de ce qui deviendra la TY deux ans plus tard, ensuite je serais pris par mes occupations professionnelles, l'école de Trial Yamaha "Moto Verte », lesvoyages, les Kits-Moteurs, ensuite les courses Africaines, la famille etc .......

et voilà comment on se retrouve, un jour, à raconter sa vie dans un bouquin ! ..... sans être retourné en Ecosse, dommage !

Amicalement

Chris RAYER

Photos :

- La montesa Cota 247 de 1968

- Christian Rayer à la Une de Moto Revue avec la belle montesa

 Plus Tard , Christian rejoint Yamaha pour une nouvelle aventure et une moto qui deviendra aussi ''Mythique'' la TY ..mais ça c'est une autre Histoire !!!

Merci à Christian pour le récit du début de la Cota

 

 


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